Critique du film Comment Fernando Pessoa sauva le Portugal réalisé en 2017 par Eugène Green, le prochain invité du podcast Imaginaires du présent, en septembre 2021 (qui parlera en détail de son dernier film Attaribi et Mikelats tourné au pays basque)

Le film s’ouvre sur un ciel bleu, puis une croix d’une église avec un ciel bleu éclatant, avec en arrière fond une voix masculine magnifiant un fado. Contemplation d’arbres avec le souffle du vent dans les branches…L’âme du Portugal s’inviterait t-elle dans ces arbres ?
Un journaliste (écrivain en fait il s’agit de Fernando Pessoa) très distingué est dérangé par son supérieur qui lui demande d’inventer un slogan publicitaire pour faire adhérer en masse les portugais à une nouvelle boisson américaine pleine de fausses promesses, le Coca Kula.La poésie au service de la publicité ou de l’intrusion ou ingérence commerciale ?
Puis loin il y a une scène où le même homme dialogue ou se confronte avec son double opposé le publiciste affairiste opportuniste.Le ministre en charge du commerce est sollicité sur cette affaire (un slogan simpliste envoûtant vient d’être créé pour attirer les portugais vers les bienfaits de cette boisson non alcoolisée), il faut trouver vite dans l’église un religieux pour désensorceler ce produit étranger maléfique ; un rituel a lieu en ce sens, comique et burlesque à la fois (le temporel sollicitant cette fois le spirituel), l’église au secours d’une importation maléfique, scène où le contenu de la bouteille est versé au pied d’un arbre qui meurt à cause de cette boisson.
L’arrivée étrangère artificielle dans le monde lusophone de cette boisson est-elle le premier pas vers l’américanisation des esprits ? Le Portugal vend-il son âme ou celle du poète en acceptant d’importer cette boisson sur ses terres ? Alors que le porto, boisson sublime alcoolisée et symbole du Portugal s’exporte partout dans le monde ?
Vues intermittentes sur le tramway éternel de Lisbonne et des pieds du voyageur poète à l’arrêt du tramway.
Scène finale métaphysique : le poète face à l’océan s’interroge sur sa face cachée (sens caché de l’apparition de son double) ?
Un très beau film qui montre le talent d’Eugène Green à faire sienne les cultures qu’il approche en fin observateur, amoureux des langues ancestrales sur les terres d’Europe, enfin en analyste en des temps très perturbés.