
Pierre Adrian est un écrivain à part, qui mérite d’être lu et reconnu.
C’est mon invité pendant ce 5ème épisode* pour son dernier livre « Les bons garçons » (éditions des équateurs) clôturant cette première saison (année 2020) d’un podcast né pendant le premier confinement.
Je ne suis pas venu par hasard, à Pierre Adrian. Curieusement, étrangement même, ma propre trajectoire rejoint la sienne, indirectement ou directement.
Le grand « tout est lié » n’a jamais été aussi vrai dans ces multiples fausses coïncidences entre sa biographie, son oeuvre et mon propre cheminement. Et ces correspondances créent un lien évidemment et se dévoilent encore plus lorsque j’ai eu la chance (l’honneur soyons franc) de rencontrer même à distance un de mes écrivains préférés via la réalisation d’un podcast qui imagine les présents (en lien avec les passés et les futurs possibles…).
Comme ce blog est complémentaire à l’émission, il peut être plus personnel et moins objectif. Ici ce n’est plus le gentil animateur qui s’exprime mais le « Cyrille intime » (peut-être celui s’asseyant sur le divan de Freud ou Lacan cela dépend ?)… J’ose le faire puisque ce blog m’y autorise.
À l’âge de 20 ans, ma première destination en voyage solitaire fut l’Italie, (Sienne, l’Ile d’Elbe…), avec des images du film le plus violent de Pasolini « Salo », que j’avais vu peu avant mon départ (premier lien avec « La piste Pasolini »). À la fin de ce séjour, je rencontre par hasard dans un centre d’hébergement catholique à Florence un acteur de Pasolini qui joue le rôle du fils (à la fin jeune peintre sombrant dans la folie) dans la famille bourgeoise du film « Théorème ». Rencontre brève et mystérieuse. Petit déjeuner avec ce comédien âgé d’une soixantaine d’années alors, il fait une chaleur étouffante et moite, il me parle du tournage du film, de la personnalité humaniste du réalisateur, de la réaction particulière du Vatican lors de la sortie du film et enfin il termine ainsi : « On dirait que vous avez peur et que cette peur est stérile » me dit-il dans un français très correct, je crois entendre derrière cette phrase la voix cachée de Pasolini…
Quelques temps après, je lis ses poèmes, ses derniers écrits et tous ses films dont la vie de « Jésus selon l’Evangile de Saint Matthieu » oeuvre qui peut ramener un tant soit peu à la foi par le côté messianique et magnétique que dégage le personnage principal du film, sous l’oeil attentif du réalisateur Pier Paolo Pasolini.
À 20 ans (comme Pierre Adrian) j’ai eu également une grande peur paralysante liée pour ma part à une apparition surgissante de nulle part, la fin d’un été, signifiait-elle la fin de l’enfance (peut-être indirectement la peur de la mort ?), deuxième lien avec l’auteur (pour qui la peur de la mort est un événement fondateur récurrent à l’âge de 20 ans).
À 11 ans, je pars dans la vallée d’Aspe faire mon premier camp de colonies (autre correspondance avec son livre « Les âmes simples » dont le récit se déroule exactement ici) avec comme directrice de camp une religieuse Sœur Paulette, non loin où réside Père Pierre…
Vers 27 ans, j’emmène un ami handicapé au Mont Saint Michel, et au retour, au milieu des paysages granitiques que nous traversons en voiture, il me parle de son admiration envers…le poète Xavier Grall….qu’admire également Pierre Adrian qui lui consacre un livre aux éditions les Equateurs.
Avant de lire « Les bons garçons » de Pierre Adrian, je lis « Les interstices du temps » d’ Eugene Green qui évoque, entre autres, l’influence de certains lieux habités par des esprits sur la psychologie ou sur les comportements atypiques des personnages, avec une dimension fantastique qui n’est pas sans rappeler parfois l’ambiance du Mont Circée près de Rome, près duquel a lieu le terrible drame final dans « Les bons garçons ». Eugène Green et Pierre Adrian ont la même fascination pour la dimension spirituelle des lieux et des connexions intemporelles entre les âmes et les lieux. Sont-ils tous les deux de la même famille en esprit ?
L’émission avec Pierre Adrian est à écouter ici et grande première et grand tournant depuis la conception de ce podcast : après appel à candidatures de recherche de voix-off, j’ai sélectionné quatre comédiens excellents pour lire des extraits clés du dernier roman de Pierre Adrian « Les bons garçons » (publié en 2020 aux éditions les Equateurs) : Mikaël Picard, Jérémy de Teyssier (à retrouver pour une chronique historique dès 2021 sur ce même podcast), Christelle Ribeiro et Mathilde Mir. Un grand merci à eux d’avoir littéralement donner leur voix et donner vie aux écrits de Pierre Adrian dont le dernier livre est notre coup de coeur littéraire.
« Coup de coeur, » disais-je mais « coup de coeur raisonné », maintenant vous comprenez pourquoi j’ai choisi Pierre Adrian comme invité.
A tous les auditeurs, auditrices du podcast, je souhaite de bonnes fêtes de fin d’année, malgré le contexte particulier.
J’écris enfin mon soutien chaleureux aux professions artistiques et culturelles directement impactées par la fermeture prolongée des établissements culturels.
A très vite pour de nouvelles écoutes imaginaires. « Faîtes de beaux rêves ! »
Paris, le 19 décembre 2020. Cyrille Paquette.

N°18 JEAN-LOUIS CLERGERIE – IMAGINAIRES DU PRÉSENT
*Sommaire détaillé de ce 5ème épisode d’ »Imaginaires du Présent »:
« j’interroge l’écrivain Pierre Adrian. Né en 1991 il a vu couronner son premier livre, « La piste Pasolini », en 2016 du Prix des Deux-Magots et du Prix François Mauriac de l’Académie française. Son deuxième livre, « Des âmes simples », a reçu le Prix Roger-Nimier et le Prix Spiritualité d’Aujourd’hui 2017. Il est également chroniqueur dans le journal L’Equipe.
Son dernier roman « Les bons garçons » a été publié en août 2020 aux éditions des Équateurs.
L’histoire : nous sommes à Rome en 1975. Les vacances d’été s’achèvent, trois garçons des beaux quartiers rencontrent deux jeunes filles du peuple. Ils flirtent en musique dans les cafés et au volant de belles voitures. Ils boivent, fument et ne vivent que dans l’attente de la prochaine soirée. Jusqu’à ce que les garçons invitent les filles à faire la fête dans une villa somptueuse du mont Circeo, une petite cité balnéaire au sud de Rome. Là-bas, l’horreur pour ces deux jeunes filles issues des faubourgs de Rome a surgi. Le fait divers est resté célèbre sous le nom de « massacre du Circeo » et a horrifié l’Italie de l’époque..
Nous parlons notamment de la lumière influente de Pasolini présente dans toute son œuvre, de sa passion pour le cyclisme, de la difficile période de confinement en France, de la peur de la mort, de ses écrivains préférés, de son sentiment de désacralisation du monde, de son immersion sur les lieux du drame au Mont Circéo près de Rome (pour se coller au plus près de la vérité sociale et historique liée à ce terrible fait divers italien), et enfin de ses projets pour 2021.
Extraits des propos de Pierre Adrian : « Si les gens lisaient plus, ils se scandaliseraient moins » in « IDP » décembre 2020.